Dossier Banques : Le party est fini, partie II

Que la Banque de Montréal tire officiellement la plogue du financement automobile de détail peut, certes, faire de la place à d’autres institutions qui élargissent leur clientèle. Mais dans les faits, le geste posé par la troisième grande banque du Canada confirme ce que les principaux acteurs de l’industrie automobile redoutaient : la récréation est terminée.

Plusieurs intervenants ont accepté de nous parler à mots couverts de ce qui vient de se produire. «Ce ne sont vraiment pas de bonnes nouvelles à entendre. Bien que cela signifie plus de clients pour les institutions qui restent, il n’y a pas de quoi se réjouir », signale l’une de nos sources du financement automobile. L’étau se resserre, poursuit-il. « D’ailleurs, ceux qui croient que tout va bien au sein de leur institution ne sont pas à l’abri des changements de décisions de leur supérieur », prévient notre contact, qui se dit très prudent pour les mois à venir.

Même réaction du côté des concessionnaires. « Que BMO quitte le bateau, cela n’est pas trop bon pour notre industrie, nous confie un dirigeant, qui a accepté de nous parler de façon anonyme. Le réseau bancaire canadien est déjà très restreint. Présentement, il n’y a que trois banques qui sont all in dans l’automobile. Ce sont notamment RBC, TD et CIBC qui démontrent un réel appétit. Desjardins et Banque Nationale sont là, mais elles ne font pas nécessairement une grande différence. Plusieurs concessionnaires comme moi aimeraient bien que leur approche change. »

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Retour sur le retrait de BMO

Rappelons qu’en septembre dernier, la Banque de Montréal a officialisé son retrait du financement aux particuliers dans le prêt automobile. Elle avait déjà ralenti depuis le début de l’année 2023.

Selon son communiqué de presse, cette décision de BMO survient après que les provisions globales pour créances douteuses de l’institution ont augmenté à 492 M$ CAN, contre 136 M$ CAN un an plus tôt, lors du trimestre ayant pris fin au 31 juillet. L’augmentation rapide des coûts d’emprunt est d’ailleurs pointée du doigt.

« En mettant fin aux activités indirectes de financement automobile de détail, nous sommes en mesure de concentrer nos ressources sur les secteurs où nous croyons que notre position concurrentielle est la plus forte », a déclaré BMO par voie de communiqué. Mentionnons que BMO a, au début de l’année, investi 16,3 G$ pour acquérir Bank of the West. Une acquisition qui permet à l’institution de s’étendre dans une trentaine d’États de l’ouest des États-Unis, incluant la Californie.

Des intervenants d’autres institutions financières nous ont justement confirmé que le dollar investi était beaucoup plus profitable dans d’autres secteurs, notamment les prêts hypothécaires, que dans l’automobile. Une de nos sources va même jusqu’à soutenir que les concessionnaires font plus d’argent avec le prêt financier que l’institution elle-même.

Certains concessionnaires ont d’ailleurs pu constater que les ristournes et autres avantages financiers dont ils disposaient en privilégiant une institution plutôt qu’une autre lors des prêts aux consommateurs ne sont déjà plus aussi alléchants qu’ils pouvaient l’être avant la pandémie. 

Dans le numéro d’AutoMédia de juin dernier (Dossier banques : Le party est fini !), une source nous indiquait que les ristournes avaient non seulement diminué, elles étaient désormais accordées pour des prêts à taux plus élevés entre 8 % et 10 %.

 

Rumeurs sur les prêts subventionnés

Sans nommer de noms, des rumeurs commencent à circuler sur le fait que des institutions financières sont prêtes à délaisser des constructeurs trop gourmands en matière de prêts subventionnés. « Ça aussi, ça envoie un mauvais signal », s’exclame une de nos trois sources qui a accepté de commenter la situation.

De récentes données de la Banque du Canada ont également montré que les taux d’impayés pour les prêts automobiles sont maintenant plus élevés qu’avant la pandémie. 

« Nous assistons actuellement à une tempête parfaite. Il faudra sans doute revoir le modèle actuel. Une des solutions pour rehausser l’appétit des institutions financières envers l’automobile serait de permettre l’effet croisé ». C’est-à-dire de permettre aux banques d’offrir d’autres services aux clients qui bénéficient d’un prêt automobile, notamment un prêt hypothécaire, des CPG, soulèvent nos sources financières.

 

Meilleure implication de la part des concessionnaires

Certains intervenants insistent aussi sur la nécessité d’une meilleure implication de la part des concessionnaires pour lutter contre la fraude et les risques de défaut de paiement. « Certains concessionnaires ont tendance à arrondir (pour ne pas dire mentir) les réels revenus du client afin que les institutions lui accordent le prêt demandé », avertit une source. Une pratique qui nuit à l’industrie.

En attendant, la dette à la consommation continue de grimper. Selon le plus récent rapport sur les tendances et perspectives en matière de crédit à la consommation d’Equifax Canada, la dette aurait atteint 2,4 G$ au Canada. L’endettement non hypothécaire au pays s’établit désormais à plus de 21 131 $. Ça non plus, ce n’est pas de bonnes nouvelles pour l’industrie.

 

 

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